Des nouvelles de Ségou : Abdoulaye Keita à Angoulême

Abdoulaye Keita, notre correspondant à Ségou a pu venir à Angoulême avant le « confinement ». Il nous apportait des nouvelles des enfants et des jeunes aidés par la Fondation. Ce fut une joie profonde de l’écouter.

La ville de Ségou se transforme. En 1983, elle comptait 80 000 habitants. Actuellement, elle en a 1 000 000 ! C’est la deuxième ville du Mali, après Bamako. L’afflux de déplacés du Nord et du reste du pays soumis aux rebelles est la cause d’un afflux incroyable de familles. Des quartiers entiers se sont créés, malheureusement sans équipements urbains de qualité. L’eau courante n’y est pas distribuée. L’électricité est rare. La pauvreté est omniprésente. Dans cette ville où la crainte règne, les enfants aidés par la Fondation Leïla Fodil poursuivent leurs études avec une grande attention.

Les pauvres, qui ne peuvent pas payer les frais d’entrée à l’école publique, se pressent auprès d’Abdoulaye Keita dès le mois de Juillet, à toute heure du jour, afin de demander pour leur enfant d’être boursier de la Fondation Leïla Fodil.

Il faut faire un choix.

Après avoir rendu visite dans la famille de chaque candidat, Abdoulaye, Rokia Keita et Daouda Tangara font un premier choix : les enfants dont la famille est réellement démunie. Ensuite, les familles sont convoquées par quartier et au cours de cette réunion, en présence d’un témoin indépendant, les parents choisissent entre eux la famille qui, ayant le plus de difficultés, sera aidée. Quel beau témoignage d’entraide !

Les plus petits, ceux du jardin d’enfants « Les anges », entrent en première année dans l’école voisine, celle de Malamine Haidara, école réputée, fréquentée par les enfants des grands quelqu’un qui ont bénéficié de jardins d’enfants de bonne qualité. Eux, les enfants de parents analphabètes, grâce à la formation du jardin, se trouvent à égalité avec les autres. Ils ne redoubleront pas.

Nos élèves du premier cycle, dans les écoles privées, n’en ont pas souffert, car les professeurs n’ont pas « grévé ». Ils ont formé dans leurs écoles des groupes de défense contre les grands qui n’ayant pas classe venaient jeter des cailloux sur leurs toits.

En second cycle en public, ces grèves vont rendre l’épreuve du DEF (équivalent du brevet) difficile. Le soutien pédagogique que la Fondation donne à nos élèves pendant les derniers mois de la scolarité, leur permet d’être à niveau. L’an dernier, leur succès au DEF (73%) a été supérieur à la moyenne générale du Mali (52%).

Cette année encore, les professeurs de l’enseignement public ont fait grève pendant de nombreux mois. Ils le sont encore ces jours-ci.

Les écoles professionnelles donnent aux jeunes des compétences très recherchées.

À l’école Vicenta Maria, toutes les infirmières diplômées sont embauchées dans les centres de santé. Kadiatou Dakouo était en possession de ce diplôme et elle suit la formation aboutissant au diplôme d’Etat. Les autres auront le choix, après les trois ans de stage exigés, de réintégrer l’école si elles le souhaitent. Elles seront alors à nouveau prises en charge la Fondation Leïla Fodil.

Le besoin d’infirmières libérales se fait sentir dans cette grande ville où il n’y a pas de médecin libéral et où les centres de santé sont très espacés. La création de groupes d’infirmières serait possible, mais le coût de l’installation est très élevé. La Fondation Leïla Fodil est à l’étude. Si vous souhaitez participer à une installation d’infirmière libérale, dites-le nous et le moment venu nous reprendrons contact avec vous.
Addendum: Certaines infirmières ayant reçu leur diplôme ont pu s’installer en ville grâce à du matériel donné par la fondation Leila Fodil et constituer ainsi un premier fonctionnement d’infirmières libérales

Les couturières sont très recherchées. Les demandes d’aide à leur formation sont très nombreuses. Si vous souhaitez parrainer l’une d’entre elles, nous vous demandons de vous engager pour la totalité de ses études.

L’école des aveugles n’a pas souffert de la grève des professeurs. Fatoumata Traoré, qui était au lycée de l’UMAV à Bamako, et qui avait contracté une grossesse, est revenue à Ségou dans sa famille. Elle vend des arachides et chante dans des cérémonies de mariage. Elle a une belle voix, pas la voix criarde des griottes. C’est une activité recherchée qui pourra lui permettre de subvenir à ses besoins. Pour l’aider à créer son orchestre, nous avons décidé de lui donner les instruments de musique de l’orchestre des aveugles qui ne fonctionne plus.

Au CAPS, centre agro pastoral, des élèves sortants sont employés dans des entreprises agricoles ou exercent comme infirmiers vétérinaires indépendants. C’est un excellent débouché. Malheureusement, l’État ayant supprimé l’affectation d’élèves boursiers, il n’y a plus de recrutement en première année. On ne peut pas donner un professeur pour trois élèves de la Fondation !

Abdoul Cheffi Maïga, après avoir fait un stage chez un pharmacien vétérinaire, a ouvert sa propre entreprise. Il a deux employés ; il va en brousse pour faire des soins et les vaccinations.

Mouna Coulibaly a choisi après sa sortie de l’école, de poursuivre des études à l’Université pour devenir ingénieure vétérinaire. Elle est boursière de l’État.

Les deux derniers élèves de la Fondation au CETI ont obtenu leur diplôme et sont passés à l’Université.

Le CPTS, Centre Professionnel de Techniciens Supérieurs, créé par Ladji Gakou est une des meilleurs écoles professionnelles du Mali. Gakou y forme, en sessions de courte durée (trois mois à un an), des techniciens en électricité – Froid – carrelage – plomberie – maçonnerie – teinture. Ces formations en alternance, donc orientées surtout sur la pratique, donnent des techniciens aptes aussitôt à exercer leur métier. Ils sont très recherchés à Ségou, mais aussi à Bla et même à Bamako. L’un d’eux s’est marié. Il a pu, avec son métier, payer la dot, condition incontournable  pour un mariage.

À l’Université, les élèves sont boursiers de l’État.

Fousseyni Traoré, qui faisait partie de la première embauche d’élèves de la Fondation Leïla Fodil au CAPS, y a terminé ses études. Il est élève ingénieur à l’Université en culture vivrière.

Le CSCOM (Centre de Santé Communautaire) de Ségou Koro a un recrutement très important des villages alentour, ce qui confirme la justesse de sa construction. L’énergie est fournie par des panneaux solaires. Le médecin renouvelle les médicaments par des commandes en flux continu, ce qui a supprimé les pertes dues à des stocks prolongés.

Aminata Maïga avait été une des premières recrutées à l’école primaire Anita A et parrainée par les élèves de l’école Sainte Marie de Blois et par Marie Joly. Après le baccalauréat, à l’Université elle a obtenu un diplôme de comptabilité qui ne lui a servi à rien, car il y a  beaucoup de comptables, mais pas d’emploi. Elle alors demandé l’aide de la Fondation pour suivre une formation d’infirmière. Elle est maintenant en troisième année de premier cycle et obtiendra certainement le diplôme. Quel courage !

Le médecin chef du cercle de Ségou, à la demande d’Abdoulaye Keita, a fourni des moustiquaires pour tous les enfants aidés par la Fondation. Ceci permettra de réduire les crises de paludisme qui ont fait des ravages l’année dernière lors de l’hivernage.

Enfin, nous avons pu, au cours du séjour à Angoulême d’Abdoulaye Keita, faire une prévision des dépenses de l’année prochaine. Le budget ne sera pas augmenté, car les ressources restent incertaines.


Ceci pour dire à ceux qui vont lire ce compte rendu que vos dons sont nécessaires. Ne l’oubliez pas. Merci d’avance au nom de tous ces enfants.